Le nouveau pouvoir sénégalais et les médias se regardent en chiens de faïence depuis maintenant de nombreux mois.

Le Pastef, qui a succédé à Benno Bokk Yakaar, semble particulièrement allergique à la manière d’opérer de la presse, sinon à sa liberté de ton et d’action.

Si tel n’était pas le cas, comment comprendre les descentes musclées de la police dans les rédactions des télévisions 7TV et TFM, ce jour-là, qui ont abouti à l’arrestation de Mme Maïmouna Faye Ndour, patronne de 7TV, et de Babacar Fall, directeur de la rédaction de TFM ?

Les deux journalistes sont en garde à vue depuis, au niveau de la Sûreté urbaine (SUR) à Dakar.

Ce qui leur est reproché serait l’interview de Madiambal Diagne, considéré comme un fugitif recherché par la justice sénégalaise, qui a émis un mandat d’arrêt international contre lui.
Ce dernier a signalé lui-même sa présence en France, où il a déjà été interpellé et interrogé par la justice française, qui l’a laissé libre pour le moment. Mais il devrait être auditionné prochainement, ses avocats ayant demandé un report.

De quoi s’agit-il ?

Il s’agit d’un dossier complexe portant sur des sommes importantes, chiffrées à plusieurs milliards de francs CFA, dans une affaire transactionnelle impliquant Madiambal Diagne et des partenaires turcs.
Des accusations de blanchiment, de corruption et de détournement de deniers publics seraient portées contre Diagne, qui a bravé l’interdiction de quitter le territoire national pour se rendre en France.

Les conditions rocambolesques de son départ — voire de son évasion — vers l’Hexagone ont valu aux patrons de la DIC (Division des investigations criminelles) et du poste de police de l’aéroport AIBD d’être limogés.
On peut penser que les interviews accordées par Diagne à 7TV et TFM sont aussi perçues comme un nouveau pied de nez de la part d’un fugitif cherchant à narguer les autorités judiciaires.

Pourtant, Diagne avait déclaré qu’il allait « revenir au Sénégal pour faire face à la justice, une fois qu’il aurait bien préparé sa défense ».
Il aurait même commis l’avocat français William Bourdon.

Une question demeure : est-il toujours dans les mêmes dispositions après les arrestations de sa femme et de ses deux fils, tous trois écroués du fait de leur implication présumée dans l’affaire — comme gérante de la SCI Pharaon pour son épouse, et comme membres d’une association de malfaiteurs pour ses fils ?
Son « marabout » figure également parmi les personnes mises en dépôt.

À l’évidence, il existe beaucoup de zones d’ombre que seul un procès pourrait aider à éclaircir.
C’est pourquoi il semble être dans l’intérêt de Madiambal Diagne de revenir au Sénégal, malgré les risques, pour expliciter, se justifier, voire laver son honneur.

La fuite et/ou l’exil sont-ils des options pertinentes ?
Peut-être à court terme, mais non à moyen et long terme, surtout pour un homme déjà engagé en politique.
Madiambal Diagne figurait à la 15ᵉ place sur la liste des législatives présidée par Amadou Bâ.
Il n’a pas été élu.