Le président Ouattara

Des milliers d’Ivoiriens ont manifesté ce jour dans la banlieue de Yopougon, à Abidjan, pour dénoncer la candidature d’Alassane Ouattara à un quatrième mandat successif.

Ils ont également exigé la participation de Laurent Gbagbo et de Tidjane Thiam, écartés de la compétition par des manœuvres jugées illégales, opérées par le pouvoir en place.

 

La manifestation, qui a rassemblé un grand nombre de participants — militants du Parti des peuples africains (PPA-Côte d’Ivoire) de Gbagbo et du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) de Tidjane Thiam —, s’est déroulée dans le calme.

Mais les slogans brandis et l’enthousiasme de la foule ont démontré la détermination et l’engagement des militants à défier le pouvoir pour obtenir gain de cause.

L’opposition a réussi une démonstration de force, malgré l’absence des leaders que sont Laurent Gbagbo et Tidjane Thiam.

Ce dernier est en Europe, où il semble s’éterniser, alors que la date de la présidentielle est fixée au 25 octobre. On comprend qu’il cherche à rallier la communauté internationale à sa cause, pour qu’elle exerce une pression sur Ouattara et l’oblige à accepter sa candidature.

La démarche paraît toutefois trop optimiste et accorde une place excessive à l’action extérieure, au détriment de la lutte sur le terrain.

Son absence aujourd’hui à la manifestation de Yopougon est une erreur stratégique. À mesure que l’échéance électorale approche, le désespoir des militants de l’opposition pourrait déboucher sur des actes incontrôlés.

Sa présence, tout comme celle de Gbagbo, aurait donné un éclat plus fort à l’événement, ce qui aurait pu faire réfléchir les autorités. Ces dernières savent qu’une explosion de violence n’est pas à écarter à l’approche du scrutin présidentiel.

Le souvenir douloureux des affrontements de 2010-2011 et de 2020 hante encore de nombreuses familles qui en ont souffert directement. La Côte d’Ivoire n’est pas à l’abri d’une nouvelle dérive électorale.

Est-il trop tard pour éviter un dérapage dangereux ? Ouattara est-il dans une logique de compromis ? Rien n’est moins sûr.

Pourtant, la sagesse devrait lui dicter d’éviter une épreuve de force aux conséquences imprévisibles.

Lui qui a connu l’injustice du déni électoral ou participatif devrait s’en souvenir et agir avec lucidité, notamment envers Tidjane Thiam.

Ce dernier n’est coupable de rien, et le fait de l’écarter de la présidentielle constitue bel et bien un déni de justice. Sa participation aurait crédibilisé l’élection qui, telle qu’elle se dessine, risque de se dérouler sans la présence d’aucun candidat d’envergure côté opposition.

Cela entacherait inévitablement l’issue du vote et sa sincérité.

Le pouvoir peut céder à une mémoire sélective. À tort.

Les opposants viennent de lancer un avertissement par une démarche pacifique. L’élan populaire suscité devrait dessiller les yeux des membres du régime.

À la bonne heure !