Depuis l’alternance politique au Sénégal suite à l’élection présidentielle du 24 mars 2024, une polémique majeure secoue le pays autour d’un rapport d’audit des finances publiques, publié le 12 février 2025 par la Chambre des Affaires Budgétaires et Financières (CABF) de la Cour des Comptes. Ce rapport accuse gravement l’ancien président Macky Sall et son gouvernement de mauvaise gestion financière. Cependant, une analyse approfondie réalisée par l’Alliance pour la République (APR), le parti de Macky Sall, démontre que ces accusations sont infondées, résultant d’une stratégie politique orchestrée par le Premier ministre Ousmane Sonko et le président Bassirou Diomaye Faye, visant à discréditer leur prédécesseur.

Le rapport de l’APR met en évidence de nombreuses irrégularités procédurales et des violations flagrantes du cadre juridique sénégalais dans l’élaboration de l’audit en question. Premièrement, ce rapport, abusivement nommé « Rapport de la Cour des Comptes », n’a pas été adopté selon la procédure habituelle, à savoir par une assemblée plénière regroupant toutes les chambres de la Cour des Comptes. Il a été élaboré uniquement par la CABF, ce qui constitue une grave entorse aux normes internes et à l’usage traditionnel de l’institution judiciaire sénégalaise.

Ensuite, le principe du contradictoire, fondamental dans tout processus d’audit sérieux, a été totalement ignoré. Aucune des personnes ni aucune des administrations mises en cause n’ont été informées à l’avance ni invitées à répondre aux observations avant publication, ce qui s’apparente davantage à un procès d’intention qu’à un audit impartial. De plus, la composition même de la commission d’audit a été modifiée en cours de route, après que certains magistrats aient refusé de cautionner cette démarche biaisée, révélant un malaise profond au sein même de la Cour des Comptes.

Cette manœuvre politisée a été rendue manifeste par l’attitude du Premier ministre Ousmane Sonko, qui dès septembre 2024, bien avant la publication du rapport, avait publiquement accusé l’ancien régime de maquillage des comptes, brandissant des menaces judiciaires sans jamais présenter de preuves tangibles. Sonko prétendait même détenir des informations issues d’un rapport de l’Inspection Générale des Finances (IGF), document interne auquel il n’aurait jamais dû avoir accès, compromettant ainsi la séparation des pouvoirs et la confidentialité exigée.

L’épisode le plus révélateur de cette manipulation politique demeure la fuite organisée du rapport sur les réseaux sociaux avant sa diffusion officielle, couplée à la mystérieuse désactivation du site web de la Cour des Comptes pendant deux jours, empêchant toute vérification immédiate par les citoyens sénégalais. De même, lors d’une conférence de presse du gouvernement, des contradictions flagrantes ont été observées, notamment dans les propos du ministre Secrétaire général Ahmadou Al Aminou Lo, qui a affirmé publiquement ne jamais avoir eu connaissance de maquillages financiers, avant de se contredire sous la pression de sa hiérarchie quelques jours plus tard.

Sur le fond, les accusations avancées par le gouvernement Sonko-Faye se révèlent creuses et manipulatoires. Par exemple, le chiffre spectaculaire de « 4000 milliards FCFA de déficit non déclaré » est le résultat direct d’une modification arbitraire de la méthodologie comptable utilisée par le nouveau gouvernement pour rétrospectivement gonfler artificiellement le déficit public des années 2019 à 2023. Ainsi, des prêts-projets initialement ventilés sur plusieurs exercices ont été intégralement comptabilisés sur chaque année concernée, créant un déficit fictif.

Cette manipulation comptable inclut aussi l’assimilation abusive de facilités financières temporaires (avances bancaires et découverts de trésorerie) à de la dette publique, alors qu’il s’agit simplement de mécanismes habituels de gestion de trésorerie. Ce changement brutal de méthode, non conforme aux pratiques habituelles, a ainsi permis d’atteindre le chiffre choc de 4000 milliards de FCFA présenté fallacieusement comme un « déficit caché ». De plus, deux versions du rapport ont circulé publiquement, dont une non signée et incomplète, ce qui a considérablement affaibli sa crédibilité.

Autre accusation phare, celle d’un prétendu compte bancaire secret d’un montant astronomique de 1000 milliards FCFA détenu par un dignitaire de l’ancien régime, reste totalement non prouvée à ce jour. Aucune preuve concrète n’a été fournie, révélant le caractère purement médiatique et politique de cette allégation destinée à choquer l’opinion publique sans fondement tangible.

Par ailleurs, le rapport de la CABF ne formule aucune accusation explicite de détournement de fonds publics, ni ne recommande l’ouverture de procédures judiciaires contre quiconque. Il n’identifie aucun cas précis de malversation, se contentant d’observations générales et de recommandations administratives pour améliorer les procédures financières, sans aucune sanction ou remboursement exigés. Malgré cela, le gouvernement Sonko-Faye a ouvertement instrumentalisé ce rapport à des fins politiques, allant jusqu’à appeler à une mobilisation populaire pour traduire Macky Sall devant la Haute Cour de Justice pour haute trahison, tentative qui n’a rencontré aucun succès auprès de la population.

Cette offensive politique a entraîné des conséquences économiques catastrophiques pour le Sénégal, sapant gravement la crédibilité financière internationale du pays. Les agences de notation Moody’s et Standard & Poor’s ont dégradé la note souveraine du Sénégal à « B3 » et « B » respectivement, avec perspectives négatives. Le FMI, inquiet de la confusion créée autour des comptes sénégalais, a suspendu son programme de coopération financière, mettant le Sénégal sous haute surveillance et réduisant drastiquement ses capacités d’emprunt à des conditions favorables.

Enfin, la stratégie Sonko-Faye apparaît d’autant plus contradictoire qu’elle accuse de nombreux hauts fonctionnaires de mauvaise gestion tout en les maintenant, voire les promouvant, dans des postes clés au sein de l’État. Cette incohérence souligne davantage la nature politique de l’offensive contre Macky Sall, destinée à le discréditer personnellement plutôt qu’à résoudre de réels problèmes de gouvernance.

Face à ces faits accablants, le rapport de l’APR conclut fermement à l’absence totale de fondements des accusations portées contre l’ancien régime. Il appelle à une réaction vigoureuse des institutions sénégalaises, de l’Assemblée nationale et des partenaires internationaux pour exiger des clarifications immédiates sur la procédure irrégulière utilisée pour la production de l’audit. Le but est de rétablir la vérité des faits, de restaurer la crédibilité du Sénégal à l’international, et d’empêcher que de telles manœuvres politiciennes n’affaiblissent davantage les institutions démocratiques sénégalaises.