La publication du numéro de téléphone du Premier ministre sénégalais, Ousmane Sonko, par un de ses « militants » l’a contraint à changer tous ses contacts.
Cet incident mérite réflexion, car il révèle un amateurisme condamnable, fruit d’un populisme tout aussi critiquable. Le numéro personnel d’un Premier ministre ne peut et ne doit pas être accessible à des personnes indignes de confiance. À l’évidence, la personne qui a « fuité » le numéro de Sonko n’aurait jamais dû l’avoir.
Les précautions élémentaires n’ont pas été prises, ou alors pas avec la rigueur nécessaire. Minimiser cet incident serait une erreur grave, car il met en lumière, entre autres, les limites du populisme et les dangers qu’il fait courir à l’État démocratique.
Lorsqu’on exerce des responsabilités au plus haut niveau de l’État, certains actes interrogent. Ils doivent être décryptés et dénoncés.
Il faut cependant saluer la révélation de cette bourde, qui égratigne le nouveau régime, déjà accaparé par des dossiers autrement plus sérieux. En effet, la flambée des prix des denrées de première nécessité, qui donne le tournis aux ménagères, les vagues de licenciements frappant des centaines de travailleurs du port de Dakar, du ministère de la Santé, de l’AIBD et d’autres entreprises publiques, ont fini par susciter la colère des salariés.
Malgré les propos apaisants – une fois n’est pas coutume – de Sonko, les tensions demeurent. Qu’en sera-t-il lorsque les mesures d’austérité du FMI seront imposées ?
Les finances publiques sénégalaises sont dans une situation plus que préoccupante. Soit dit en passant, nul ne comprend, dans ce contexte, pourquoi les propositions de cautionnement de personnes accusées de détournement de deniers publics ne sont pas acceptées. Ou alors, la volonté de les humilier prime-t-elle sur toute autre considération ?
Le peuple sénégalais veut la justice, pas des règlements de comptes mesquins. L’État n’est pas une propriété personnelle et ceux qui le dirigent sont en contrat à durée déterminée, révocable à tout moment, lorsqu’une élection tourne à la Bérézina, par exemple.
La mésaventure de Sonko est très instructive en ce qu’elle met en évidence les limites du populisme et l’isolement qu’impose le travail d’homme d’État.
Un secrétariat de parti mieux structuré et organisé pourrait pallier ces dysfonctionnements en offrant aux militants un espace d’écoute, pour éviter ce genre de dérives.
Tout le monde comprend que le duo Diomaye/Sonko a du pain sur la planche, avec des salaires et des bourses à verser chaque mois, même si les caisses sont vides.
Quant aux demandeurs de sukeurou kor, ils devront patienter.