En campagne hier, le Premier ministre du Sénégal et tête de liste Ousmane Sonko a tenu une déclaration qu’il a aussitôt postée sur sa page Facebook.

Il a écrit ceci : « À tous les patriotes du pays, Barthélemy Dias et sa coalition ne doivent plus battre campagne dans ce pays. Notre parti a été agressé à Dakar, à Koungheul, à Saint-Louis, à Louga, à Mbacké… Des plaintes ont été déposées, des preuves visuelles existent. À ce jour, zéro arrestation. Que chacune des agressions subies par PASTEF de leur part depuis le début de la campagne, que chaque patriote qu’ils ont agressé et blessé, soient proportionnellement vengés. Nous exercerons notre droit légitime à la riposte ».

Avec ces propos, Ousmane Sonko incite ses partisans à des actions violentes contre une autre coalition de l’opposition dirigée par Barthélemy Dias, tête de liste de Saam Sa Kaddu. Le leader de Pastef rejoint ainsi Abass Fall, tête de liste à Dakar, qui avait demandé à ses partisans de s’armer. Le lendemain, le siège de Saam Sa Kaddu a été saccagé. Malgré la plainte déposée par l’opposition, Abass Fall, considéré comme instigateur de cette agression, n’a pas été inquiété.

Barthélemy Dias avait également sollicité le ministre de l’Intérieur pour des mesures de sécurité en faveur des têtes de liste, à l’instar de la protection assurée à Ousmane Sonko par le GIGN et la BIP. Cependant, Jean Baptiste Tine n’a pas pris de dispositions à cet effet.

Réaction tardive du ministère de l’Intérieur

Ce n’est qu’hier, après plusieurs échauffourées, que le ministre de l’Intérieur a publié un communiqué déclarant : « Le ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique a été informé qu’en dépit de toutes les dispositions prises pour permettre une campagne électorale apaisée, certains acteurs nourrissent des projets d’actes de violence et de sabotage contre des caravanes et d’autres activités organisées par des listes concurrentes.

Il met également en garde les éventuels contrevenants à l’arrêté n°026507 du 22 octobre 2024 interdisant le port d’armes de toutes catégories et de matières explosives, du 17 octobre au 17 décembre 2024. Des instructions fermes ont été données aux forces de sécurité pour fouiller systématiquement les personnes et les cortèges jugés suspects. Toute arme trouvée entraînera des sanctions prévues par la loi. »

Le communiqué continue : « Par ailleurs, pour mieux assurer l’ordre et la sécurité publics, le ministre demande aux partis politiques, aux coalitions de partis politiques légalement constitués et aux entités regroupant des personnes indépendantes, de communiquer aux autorités administratives concernées, au plus tard la veille de leur déplacement, l’itinéraire et les horaires de passage de leurs cortèges ».

Le ministre de l’Intérieur a conclu en appelant « au sens des responsabilités de tous les acteurs pour la poursuite de la campagne électorale dans un climat de paix et de sérénité ».

Le risque de division plane

Jean Baptiste Tine aurait dû commencer par apaiser ses partisans, notamment le Premier ministre et Abass Fall. Le Sénégal se dirige vers une situation à haut risque. Le pays semble à la lisière d’une guerre civile.

Les propos d’Ousmane Sonko n’ont pas laissé ses adversaires indifférents. Le camp opposé pourrait prendre toutes les mesures nécessaires pour riposter. La confrontation devient donc inévitable si aucune disposition n’est prise. Jean Baptiste Tine doit rencontrer les têtes de liste pour calmer les tensions électorales.

Sonko et la violence à Dakar

Ousmane Sonko a demandé à ses partisans d’attaquer Barthélemy Dias. L’ordre a été donné de s’en prendre au domicile du maire de Dakar pour le saccager. En cas d’affrontement, les dommages seront subis par les Dakarois eux-mêmes, avec des victimes parmi les fils de Dakar. Pourquoi, alors, Ousmane Sonko cherche-t-il à transformer la capitale en champ de guerre ? Les opposants semblent éviter Ziguinchor en raison des jeunes recrutés par Sonko pour s’attaquer à eux. En conséquence, aucun des candidats de l’opposition ne s’est rendu en Casamance.

C’est une première que des élections se déroulent sans que l’opposition ne se rende dans le sud du pays. En effet, le territoire semble aujourd’hui divisé entre le nord et le sud, car certains citoyens, bien que dans l’opposition, ont été dissuadés de battre campagne dans une partie du territoire national. L’intégrité territoriale est donc en jeu. En tout état de cause, les Dakarois doivent éviter de s’affronter.

Face à cette situation politique très fragile au Sénégal, le ministre de l’Intérieur risque d’être dépassé, et l’armée pourrait être obligée d’intervenir pour rétablir l’ordre. Mais de quelle manière ?