Dans une récente déclaration publique, Ousmane Sonko, Premier ministre, a vivement critiqué la situation économique du Sénégal, évoquant un « pays en ruines » et accusant la précédente administration d’avoir laissé des « dérapages graves » dans la gestion des finances publiques. Cependant, les dernières précisions apportées par le nouveau Représentant-résident du Fonds Monétaire International (FMI) au Sénégal, Majdi Debbich, contredisent de manière éclatante ces assertions et éclairent sous un autre jour l’état des finances publiques sénégalaises.
Le FMI dément un effondrement des finances publiques
Dans un entretien exclusif accordé au journal Le Soleil, Majdi Debbich a révélé que le rapport d’audit général sur les finances publiques, auquel Ousmane Sonko s’est référé pour justifier ses propos alarmistes, est encore en phase de certification au niveau de la Cour des comptes. Cette précision est cruciale, car elle démontre que les conclusions définitives de cet audit ne sont pas encore disponibles. Il apparaît ainsi que les affirmations du Premier ministre sont prématurées et basées sur des informations non encore validées par les autorités compétentes.
En effet, selon le Représentant-résident du FMI, le rapport sur la situation financière du Sénégal est toujours en cours d’évaluation. Cela signifie qu’aucune conclusion officielle n’a été formulée à ce jour, ce qui jette le doute sur l’objectivité des propos tenus par Ousmane Sonko. En utilisant des termes forts comme « un pays en ruines », le Premier ministre semble chercher à dramatiser la situation à des fins politiques, alors que les experts du FMI appellent au contraire à la retenue et à l’attente des conclusions finales de l’audit.
Un déficit budgétaire qui requiert des réformes structurelles, et non une situation de crise
Majdi Debbich a également expliqué que le déficit budgétaire actuel du Sénégal, fixé à 7,5 %, est le résultat d’un contexte économique international difficile, marqué par la pandémie de Covid-19, la crise alimentaire mondiale et le ralentissement de l’activité économique. Si ce niveau de déficit est supérieur à l’objectif initial de 3,9 % fixé dans la Loi de Finances 2024, il ne traduit en aucun cas une situation de dérapage incontrôlé, mais plutôt la nécessité de poursuivre des réformes structurelles pour ramener le déficit à un niveau soutenable.
Contrairement aux propos alarmistes d’Ousmane Sonko, le FMI ne parle pas d’un « effondrement » des finances publiques, mais préconise la mise en œuvre effective des réformes déjà prévues dans la Loi de Finances initiale. Parmi ces réformes figurent la rationalisation des subventions à l’énergie, la réduction des dépenses fiscales, ainsi qu’un meilleur ciblage des ressources pour soutenir la croissance et la création d’emplois. Ces mesures visent à améliorer la résilience budgétaire du pays sans pour autant compromettre son développement économique.
Une gestion prudente de la dette publique
Autre point soulevé par le Représentant du FMI : la situation de la dette publique du Sénégal. Majdi Debbich a confirmé que le pays est actuellement classé dans la catégorie de « risque modéré de surendettement », une position qui témoigne de la capacité du Sénégal à honorer ses engagements financiers. Contrairement aux assertions du Premier ministre évoquant une dette « incontrôlable », le FMI se montre plus mesuré et considère que le niveau d’endettement reste gérable sous réserve de politiques économiques saines et d’une accélération des réformes structurelles.
Ainsi, loin des scénarios catastrophiques décrits par Ousmane Sonko, la situation de la dette publique est suivie de près par les partenaires financiers du Sénégal, qui s’accordent à dire que le pays peut contenir les risques d’endettement en mettant en œuvre les bonnes politiques économiques.
L’audit en cours de certification : un gage de transparence et de bonne gouvernance
Enfin, le Représentant-résident du FMI a salué l’initiative de mener un audit général des finances publiques, qui devrait permettre de consolider les avancées en matière de transparence et de gouvernance. Il s’agit, selon lui, d’un pas important vers la mise en place d’une gestion plus rigoureuse des finances publiques, qui est au cœur du programme de réformes conclu entre le Sénégal et le FMI.
Cet engagement du Sénégal pour plus de transparence est un gage de crédibilité vis-à-vis des institutions internationales, en dépit des difficultés économiques actuelles. En ce sens, les propos d’Ousmane Sonko, en l’absence de données validées et disponibles, risquent d’affaiblir la perception de la stabilité économique du pays, au moment où l’audit n’a pas encore révélé ses conclusions définitives.
Un appel à la retenue et à la responsabilité
En définitive, l’analyse du FMI met à nu les exagérations du Premier ministre sur la situation économique du pays. Majdi Debbich appelle à la retenue et à une approche fondée sur les faits et les chiffres officiels. En accusant sans preuve tangible, Ousmane Sonko risque de semer le doute parmi les investisseurs et les partenaires financiers du Sénégal, au lieu de renforcer la confiance dans les capacités de l’économie nationale.
Il est donc crucial que les acteurs politiques s’appuient sur des informations validées avant de tirer des conclusions hâtives sur la situation économique du pays. La démarche prônée par le FMI montre qu’il est possible de discuter de l’état des finances publiques du Sénégal de manière constructive, sans tomber dans des caricatures alarmistes, au risque de porter atteinte à la crédibilité économique du pays.