Le président centrafricain Faustin Archange Touadéra a démis hier mardi de ses fonctions la présidente de la Cour constitutionnelle dans un décret aussitôt attaqué par l’opposition qui l’accuse de « coup d’Etat constitutionnel » dans le but de l’autoriser à briguer un troisième mandat.
A la tête de la juridiction suprême qui a récemment invalidé plusieurs décrets et projets de loi, Danièle Darlan est considérée comme le symbole du bras de fer entre le camp de Touadéra et l’opposition et une grande partie de la société civile, qui l’accusent de chercher à tout prix à se maintenir longtemps au pouvoir.
« Sont (…) rapportées les dispositions du décret du 10 avril 2017 entérinant l’élection des membres du bureau de la Cour constitutionnelle, en ce qui concerne exclusivement Madame Danièle Darlan, pour empêchement définitif », proclame un décret du chef de l’Etat lu à l’antenne des radios et télévisions publiques mardi.
Mme Darlan est régulièrement violemment attaquée verbalement, voire menacée, sur les réseaux sociaux et dans les manifestations pro-pouvoir. Interrogée mardi par l’AFP, elle n’a pas souhaité s’exprimer, dans l’attente d’éclaircissements juridiques sur son sort, l’opposition ayant déjà annoncé un recours en inconstitutionnalité contre le décret.
Fin août dernier, le président Touadéra avait installé par décrets un comité chargé de rédiger une nouvelle Constitution mais, le 23 septembre, la Cour constitutionnelle les avait annulés sur saisine de l’opposition qui redoutait une remise en cause de l’interdiction de briguer plus de deux mandats dans l’actuelle loi fondamentale.
Touadéra avait été réélu pour cinq ans en décembre 2020 avec 53,16% des voix, mais dans un scrutin très contesté par l’opposition et pour lequel moins d’un électeur inscrit sur trois avait eu la possibilité de se rendre aux urnes dans un pays alors occupé aux deux tiers par des groupes armés rebelles et théâtre d’une vaste offensive de certains.
Le président Touadéra « vient d’opérer ce jour un coup d’Etat constitutionnel en violant la sacro-sainte règle constitutionnelle de l’inamovibilité des juges de la Cour », écrit dans un communiqué hier mardi le Bloc Républicain pour la Défense de la Constitution (BRDC), plateforme de partis d’opposition et d’organisations de la société civile. « Dès demain matin, un recours sera déposé en inconstitutionnalité », conclut le BRDC.