La mission de la CEDEAO à Ouagadougou, d’abord retardée d’un jour, a finalement eu lieu hier mardi, dans un contexte difficile.

La délégation dirigée par l’ex-président du Niger, Issoufou a certes rencontré les chefs religieux et le nouvel homme fort ,le capitaine Ibrahim Traoré, mais n’a pas été chaleureusement accueillie  par les populations.

Notamment les bandes de jeunes manipulés par les pro-russes qui ont organisé des manifestations hostiles et ont dénoncé la France.

Pourtant ,le capitaine Traoré les avait mis en garde contre toute tentative de saboter la mission de la CEDEAO.

Traoré s’étant engagé à poursuivre les négociations entamées par son prédécesseur ,Damiba, avec la CEDEAO.

Il a donc tenu promesse et ses interlocuteurs ont apprécié positivement les discussions qu’ils ont eues avec lui.

Pourtant, Traoré avait indiqué qu’il avait comme objectif  d’avoir d’autres partenaires (les russes et Wagner),sans les citer.

Les drapeaux russes brandis lors du passage de son cortège d’auto- célébration dans la capitale burkinabé ne laissaient planer aucun doute.

Hier mardi, lors du passage des médiateurs de la CEDEAO ,les quelques dizaines de manifestants ont hué la CEDEAO et la France,tout en applaudissant Moscou.

Mais la question est de savoir si Traoré va suivre ,à la lettre ,cette option suicidaire sur les plans politique et économique.

Le Burkina peut constater que le Mali qui a suivi cette voie populiste et infantile ,se débat dans une crise profonde, avec des attaques terroristes plus nombreuses que jamais et une précarité sociale  généralisée.

A l’évidence la Russie et Wagner ne sont pas la solution.

En Centrafrique comme au Mali ,leur présence est synonyme de fuite en avant dans la violence et les pillages économiques.

Il est compréhensible, cependant qu’une jeunesse déboussolée, soit la proie de manipulateurs qui abusent de leur naïveté et de leur ignorance.

Traoré, capitaine âgé de 34 ans,  affirme qu’il cèdera la place dès qu’un président de la transition sera désignée.

Ne va-t-il pas  se laisser tenter par la jouissance du pouvoir ?

Des capitaines au pouvoir, le Burkina en a déjà essayé : Sankara et Compaoré.

Cela s’était mal terminé.

L’incompétence, la drogue du pouvoir ,les flatteries et les rêves de gloire ont souvent perdu les petits officiers en kaki.

Les mêmes causes produisent les mêmes effets.

Le Burkina est embarqué dans une nouvelle aventure vers l’impasse.

L’optimisme d’Issoufou ne se justifie pas, car le discours public de Traoré n’est pas rassurant et son immaturité politique saute aux yeux. Sa volonté de paraître, aussi.

Cette foule qui l’a acclamé, pourrait vite se retourner contre lui. Et il n’aura plus que deux choix possibles : jouer les dictateurs ou s’effacer comme Damiba.

Le flou artistique du moment va se dissiper.

Certes attiser le sentiment anti français est facile,  en « exploitant » la colère des jeunes que le discours de Macron à  l’université de Ouagadougou (28 novembre 2017)  ne fait plus rêver.

Car, il n’y a pas eu le service après-vente : les visas pour la France sont difficiles à avoir,plus que jamais.

Les personnels français des consulats  qui  sont d’une rare arrogance suscitent  colère et  indignation.

Il est vrai que la France ne peut « ni abriter toute la misère du monde »,ni donner des visas à tous les demandeurs.

Mais, les personnels des Ambassades et des consulats pourraient soigner leur comportement, ou  ceux des centres délocalisés qui reçoivent les demandeurs de visas.

Il y a bien des raisons à la colère anti-française qu’il faut oser identifier ,pour agir et y apporter des solutions  de bon sens.

Lutter  vraiment contre le racisme serait un bon début.

Participer activement à la lutte contre la pauvreté dans tout le Sahel et dans toute l’Afrique est aussi une croisade à mener.

La CEDEAO est en difficulté car ses moyens sont limités et sa crédibilité mise en question. Elle doit faire sa mue pour pouvoir agir en amont et  en aval dans les pays en crise.

La vérité est que le Burkina est entre le marteau et l’enclume de la révolte de la jeunesse et  l’incurie de ses leaders ,face à des djihadistes sanguinaires qui profitent de la situation.

Comme les russes et les mercenaires de Wagner qui font propagande de tout bois pour manipuler des populations analphabètes, obscurantistes et paupérisées.

Et qui prolongent la guerre en Ukraine sur le sol africain.

Les seules mises en garde des occidentaux ne suffiront pas comme antidote.