La situation était très confuse au Burkina Faso depuis dimanche, où des mutineries de militaires dans plusieurs casernes ont été notées. Le flou a été maintenu jusqu’à hier lundi en début d’après-midi quand des militaires ont annoncé à la télévision nationale que le président Roch Marc Christian Kaboré a été destitué.
Dans leur communiqué lu à la télévision nationale burkinabè (RTB), en fin de journée, hier, les militaires ont annoncé la fin des pouvoirs du président Roch Marc Christian Kaboré ainsi que la suspension des principales institutions du pays. Ils ont également déclaré que les frontières du pays sont fermées et qu’un couvre-feu a été instauré.
Pourtant, le ministre de la Défense, le général Barthélémy Simporé, avait déclaré, dimanche, qu’aucune institution de la République n’été visée par les militaires qui, selon lui réclamait des moyens plus adaptés pour faire face à la menace djihadiste.
Dans un communiqué publié, dimanche, le gouvernement avait démenti tout coup d’État.
« Des informations véhiculées dans des réseaux sociaux tendent à faire croire à une prise de pouvoir par l’armée en ce jour. Le gouvernement, tout en reconnaissant l’effectivité de tirs dans certaines casernes, dément ces informations et appelle les populations à rester sereines », indiquait, en effet, Alkassoum Maiga, porte-parole du gouvernement.
Paul Henri Sandaogo Damiba, nouvel homme fort de Ouagadougou
Dans les communiqués lus par les mutins à la RTB, lundi, Paul-Henri Sandaogo Damiba est présenté comme le Président du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR), qui assure désormais le pouvoir au Burkina Faso.
Le nouvel homme fort de Ouagadougou est un lieutenant-colonel d’infanterie de l’armée burkinabè. Il était devenu, le 3 décembre dernier, commandant de la troisième région militaire du pays, qui est notamment responsable du dispositif antiterroriste dans la zone Est du Burkina, ainsi que de la sécurité de la capitale Ouagadougou.
Paul-Henri Sandaogo Damiba avait été pourtant nommé à ce poste par un décret signé par Roch Marc Christian Kaboré, qui avait procédé à un vaste réaménagement dans la hiérarchie militaire au lendemain de l’attaque d’Inata, qui avait fait 57 morts, dont 53 gendarmes, il y a trois mois.
Le nouveau chef de la junte burkinabè, fait partie de ceux que l’ancien Président de transition, Michel Kafando, avait surnommé « les boys », pour s’être opposés au coup d’État de 2015 mené par des éléments de l’ex-RSP, le régiment de sécurité présidentielle, qui a été dissout depuis.
Selon plusieurs sources, le lieutenant-colonel Damiba aurait côtoyé, durant sa formation au sein de l’armée nationale, le colonel Zoungrana, arrêté il y a deux semaines, parce qu’il était soupçonné de préparer un coup d’État.
Le lieutenant-colonel Damiba est diplômé de l’école militaire de Paris – son nom figure en effet au Journal officiel parmi les officiers étrangers diplômés de la 24ème promotion de l’école de Guerre, en 2017 –, qu’il est titulaire d’un master 2 en sciences criminelles du Conservatoire national des arts et métiers (le CNAM) de Paris, et qu’il a également une certification d’expert de la Défense en management, commandement et stratégie. Il a été engagé dans plusieurs opérations antiterroristes entre 2015 et 2019.
D’une simple mutinerie au coup d’Etat
Dimanche, dans la matinée, aux camps militaires du général Baba Sy et de Sangoulé Lamizana, à Ouagadougou, des tirs à l’arme lourde et à l’arme automatique, avaient été entendus. Des incidents ont été aussi signalés à Kaya et Ouahigouya dans le Nord du pays.
Jusque dans la mi-journée, les tirs étaient entendus dans les deux camps militaires de Ouagadougou. Des tirs étaient également entendus à la base aérienne, à côté de l’aéroport international de Ouagadougou où tout le périmètre était bouclé. Des partisans des militaires avaient ensuite incendié le siège du parti au pouvoir à Ouagadougou.
A Kaya, des tirs ont été aussi entendus au régiment d’artillerie lourde, de même que dans le camp d’Ouahigouya, autre ville de province.
Samedi, au moins deux soldats avaient été tués et plusieurs autres blessés dans l’explosion d’un engin artisanal, sur l’axe entre Ouahigouya et Titao (Nord), au passage de leur véhicule qui escortait des commerçants, selon des sources sécuritaires. Depuis ce week-end, la connexion Internet était coupée dans plusieurs villes du pays.