Pour qui doutait encore de la volonté tenace de l’ex-président, ex-détenu à la CPI, Laurent Gbagbo, blanchi et triomphalement accueilli par ses partisans en Côte d’Ivoire, de poursuivre son combat politique, l’évidence n’est pas discutable.
Il a décidé ce jour, après avoir participé à une réunion de ses partisans, de créer un nouveau parti.
Pour rompre définitivement les amarres avec son ex-lieutenant, Pascal Affi-Nguessan, qui s’est approprié légalement le FPI (front patriotique ivoirien), qu’il avait fondé avec son ex-compagne Simone Gbagbo.
Gbagbo veut parer au plus pressé et se fixe comme objectif la création d’un nouveau parti d’ici le mois d’octobre.
L’ « obstacle Nguessan » sera ainsi contourné, sans déclencher une bataille politique artificielle qui va retarder son projet, qui est de revenir au premier plan, pour conquérir le pouvoir.
C’est ce à quoi sert un parti et Gbagbo a déjà réussi le coup.
Mais c’était dans des circonstances spécifiques qui ont permis d’écarter et Bédié et Ouattara.
Une telle opportunité ne semble pas se dessiner, dans un horizon proche.
Il y a un autre obstacle de taille : le blocage judiciaire que constitue sa condamnation à 20 ans de prison pour le casse de la BCEAO.
Peut-être qu’il a reçu des assurances de Ouattara, patron du RHDP, parti majoritaire à l’Assemblée qui peut décider de voter ou non une amnistie.
Même si c’était le cas, « faire passer la pilule » au niveau de la coalition RHDP sera difficile ; même si Ouattara en demeure le leader incontesté.
La création du futur parti va aussi poser la question du positionnement de Simone Gbagbo, épouse en instance de divorce, à la demande de Gbagbo et qui reste très populaire auprès des militants.
Aujourd’hui, elle a participé à la réunion et a été très applaudie ; tout comme Laurent Gbagbo.
Cette situation rappelle celle vécue par Nelson et Winnie Mandela, qui avaient fini par se séparer, tout en restant des figures majeures de l’ANC.
La Côte d’Ivoire, cependant n’est pas l’Afrique du Sud et le FPI n’est pas l’ANC…
Le FPI est très coloré « Bété », ethnie dans laquelle le parti recrute beaucoup.
C’est sa force et sa faiblesse, car il est impossible de rayer ce parti de la carte politique ivoirienne. Mais, le caractère minoritaire des Bété exclut une victoire présidentielle ; sans une ouverture massive aux autres composantes ethniques.
Le problème, c’est que la « clôture » ethnique est aussi un repoussoir.
Il s’y ajoute la tension entre les Gbagbo qui fragilise le parti.
Une nouvelle création, dans ce contexte, est certes une solution de bon sens, pour s’affranchir de Nguessan. Mais, cela n’efface pas les contradictions internes qui continuent de miner les rangs des militants.
Gbagbo s’engage dans une opération de changement de « marque (rebranding ) », qui est un choix forcé.
Va-t-il susciter l’enthousiasme et rendre le nouveau produit plus attractif ? Rien n’est moins sûr !
Toutefois l’activisme de Gbagbo ne trompe plus personne : il va s’attaquer au pouvoir et il ne va pas y aller avec le dos de lacuillère.