Le président Alpha Condé avait pris la décision de fermer les frontières avec ses voisins, dont le Sénégal, en fin septembre dernier, juste avant l’élection présidentielle d’octobre dernier, à l’issue de laquelle il a été réélu pour un troisième mandat très contesté. Le chef de l’Etat guinéen qui invoquait des « raisons sécuritaires », maintient son « blocus » 6 mois plus tard, malgré les conséquences économiques désastreuses que crée cette situation incompréhensible. Les commerçants et transporteurs des deux pays fortement touchés par cette mesure crient leur ras-le-bol.
Cela fait 6 mois que ça dure. La fermeture des frontières entre le Sénégal et la Guinée par la seule volonté du président Alpha Condé. Une décision qui concerne également la Guinée-Bissau, alors que la frontière avec la Sierra Léone a été réouverte après que le président de ce pays avait saisi la Cédéao pour dénoncer cette décision unilatérale du dirigeantguinéen de 82 ans.
Profitant de la tribune de la 58ème session ordinaire de la Cédéao, le 23 janvier dernier, Julius Maada Bio s’était dit très préoccupé par « les restrictions imposées » par le gouvernement guinéen, qui entravent la libre circulation des marchandises et des personnes entre les deux pays et provoquent « une énorme perte économique pour les deux pays ».
La Commission de la Cédéao a d’ailleurs appelé, la semaine dernière, à la poursuite « des discussions bilatérales en cours » entre Dakar et Conakry pour la réouverture de la frontière.
Le président de l’Union des routiers du Sénégal, Gora Khouma, a confié à RFI, avoir multiplié les tentatives ces derniers mois, auprès des autorités pour alerter sur les conséquences de cette fermeture.
« Nous avons des camions sénégalais en Guinée qui n’ont pas la possibilité de sortir, nous avons aussi des camions au niveau de la frontière qui sont bloqués, la marchandise pourrit, il y a des problèmes avec les banques, les routiers sont fatigués…», a-t-il déclaré
Une autorité guinéenne citée par la même source, qui évoque également des « raisons sécuritaires » pour expliquer ce ‘’blocus’’, parlant même d’« une probable opération de déstabilisation », qui aurait pu être menée contre la Guinée,souligne que « La situation s’est débloquée avec la Sierra Leone, et les négociations se poursuivent avec le Sénégal et la Guinée Bissau ».
Discours à deux tons d’Alpha Condé
Mais pour le secrétaire administratif du syndicat des transports de Labé, Tanou Nadhel Diallo, cette situation n’a que trop duré.
« En Moyenne Guinée, 80 % des denrées viennent du Sénégal, de la Guinée-Bissau, de la Gambie. Tout est cher. Les prix ont flambé. C’est purement politique. La Cédéao a bien fait de mettre les points sur les « i », parce que c’est vraiment une catastrophe », souligne-t-il.
Dans une récente interview accordée au magazine Jeune Afrique, le président Alpha Condé a ouvertement accusé le Sénégal d’être une base-arrière pour ses opposants, affirmant que tous les complots contre la Guinée sont fomentés à Dakar.
Toutefois, dans un message lu à la télévision nationale guinéenne, à la veille de la fête d’indépendance du Sénégal, le 3 avril dernier, Alpha Condé avait déclaré être engagé à œuvrer, avec le président du Sénégal pour renforcer les liens d’amitié et de fraternité entre les deux pays.
« Je voudrais vous assurer de ma ferme détermination à œuvrer de concert avec vous pour le renforcement et la diversification de nos liens d’amitié de fraternité, unissant si heureusement nos deux pays », avait-il écrit.
Pour l’heure, les autorités sénégalaises n’ont fait aucune déclaration officielle sur ce sujet.