C’est hier, jeudi 17 décembre 2020 que les députés français ont finalement eu le dernier mot, en l’absence d’accord avec les sénateurs sur un texte commun. Ainsi, la France a maintenant un an pour remettre au Bénin les 26 œuvres du trésor de Béhanzin, alors que le sabre dit d’El Hadj Omar Tall, fondateur de l’empire Toucouleur, a déjà été restitué au Sénégal, en novembre 2019.
Avec 48 voix pour, aucune contre et deux abstentions, le texte a donc été voté, jeudi matin. Presque un consensus autour de ce texte, selon RFI, qui rapporte que la discussion a été rapide, et n’a pas duré une heure. Ainsi, les 26 œuvres du trésor de Béhanzin et le sabre avec fourreau dit d’El Hadj Omar Tall cessent de faire partie des collections nationales françaises à compter de la date d’entrée en vigueur de la loi.
Au Sénégal, la France a restitué formellement le sabre que l’ex-Premier ministre français Édouard Philippe avait symboliquement remis en novembre dernier au président Macky Sall.
Cette arme est historiquement significative puisqu’elle a appartenu à El Hadj Oumar Tall, un chef de guerre et érudit musulman qui a conquis au XIXe siècle un immense territoire à cheval sur le Sénégal, la Guinée et le Mali, et a lutté contre l’armée coloniale française.
Toutefois, l’adoption de ce projet de loi n’aura pas été aussi rapide que prévu en raison de la restitution par la France à Madagascar de la couronne ornant le dais royal de la reine Ranavalona III, en début novembre, en plein débat au Sénat sur ce projet de loi. Ce que des sénateurs, notamment de droite, ont déploré, reprochant à l’Exécutif de céder un bien culturel à un pays étranger sans demander son avis au Parlement, rapporte la même source.
C’est dans ce sens que les sénateurs ont proposé de créer une structure chargée de « mieux encadrer scientifiquement » les restitutions futures. Une proposition qui a été rejetée par le gouvernement et la majorité. En réaction, le Sénat a refusé de voter le projet de loi, mardi dernier.
La France a un an pour restituer les œuvres
Finalement, l’Assemblée nationale a eu le dernier mot, hier jeudi comme cela se passe lorsqu’il n’y a pas de consensus entre les deux Chambres. Mais il faut signaler que cette ‘’rébellion’’ des sénateurs n’était pas dirigée contre les restitutions en elles-mêmes. « Notre vote n’est en aucun cas un vote contre les restitutions au Bénin et au Sénégal », a d’ailleurs confié à la radio française, hier, Laurent Lafon, le président de la Commission des affaires culturelles du Sénat. « Il s’agit, d’une opposition à la méthode du gouvernement », a-t-il ajouté.
Qu’à cela ne tienne, l’Elysée, se réjouit de ce dénouement après l’adoption de ce texte et le processus enclenché depuis 2017. Après la restitution du sabre dit d’El Hadj Omar Tall l’année dernière au Sénégal, la France a désormais un an pour remettre aux autorités béninoises les 26 œuvres du trésor de Béhanzin, pillées en 1892 par le général Dodds lors du sac du palais d’Abomey. La restitution devrait avoir lieu d’ici la fin de l’année prochaine.
Ces pièces seront d’abord exposées temporairement au Musée international de la mémoire et de l’esclavage de Ouidah, avant d’être définitivement transférées au Musée de l’épopée des amazones et des rois du Dahomey.
Cette restitution fait suite à un engagement pris par le président français à Ouagadougou en 2017. Emmanuel Macron avait annoncé ces décisions fin 2018 sur la base d’un rapport des universitaires Bénédicte Savoy, du Collège de France, et Felwine Sarr, de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis au Sénégal, qui ont recensé 90 000 œuvres africaines dans des musées français.