On peut dire qu’on s’y attendait un peu. En effet, même ceux qui condamnent aujourd’hui l’intervention de l’armée dans la politique au Mali savaient que le président sortant, Ibrahim Boubacar Keïta, dit IBK, devait quitter son poste après avoir réussi l’exploit de se mettre à dos la majorité du peuple malien, assoiffée de liberté et de justice. Ceux qui connaissent de près le pays savent par contre que l’action venait du peuple et non de l’armée. Les officiers qui retiennent aujourd’hui le président démissionnaire ont agit selon la volonté du peuple qui s’est retrouvé devant un président élu démocratiquement certes mais qui a failli à toutes ses obligations envers son peuple.
Une chute attendue!
Sans effusion de sang, et sans faire de victimes, des hauts gradés de l’armée ont pris les choses en main pour démettre IBK de ses fonctions. Une opération qui intervient après plusieurs mois de tensions dans le pays et des manifestations qui ont failli tourner au drame. Le président, s’accrochant au pouvoir et aux avantages qu’il confère, a refusé d’entendre la rue. Il a même refusé d’écouter les médiateurs africains qui sont venus à lui pour parvenir à une sortie de crise. L’entêtement d’IBK et la détermination du peuple malien risquaient donc de mener le pays vers des affrontements que l’intervention militaire vient d’éviter.
Selon plusieurs observateurs internationaux, ce sort réservé à IBK était attendu notamment après les scandales politiques et financiers remarqués ces dernières années dans un pays qui a besoin de toutes ses ressources pour se mettre sur pieds. Les scandales financiers ont même touché l’armée qui est en plein guerre contre le terrorisme. Cette situation avait poussé l’opposition à s’organiser dans le cadre du Mouvement du 5 juin-Rassemblement des Forces patriotiques (M5-RFP) pour appeler, de façon pacifique, à des réformes que le pouvoir a continué d’ignorer malgré la grande mobilisation populaire.
Les “putschistes” acclamés par les maliens!
Adressant un message clair à la communauté internationale, qui vient aujourd’hui donner des leçons au Maliens après les avoir abandonné à leur sort, des dizaines de milliers de manifestants ont acclamé “les putschistes” dans les rues de Bamako. Ils ont fêté la destitution d’IBK et ont remercié les militaires pour leur intervention qui a principalement pour objectif de libérer le pays des mains d’un homme dont les proches sont majoritairement impliqués dans des scandales financiers.
“Nous sommes venus (…) remercier le peuple malien pour son soutien. Nous n’avons fait que parachever le travail que vous aviez commencé”, a lancé à la foule enthousiaste Ismael Wagué, après avoir expliqué par “un empêchement de dernière minute” l’absence du chef de la junte et nouvel homme fort du Mali, le colonel Assimi Goïta, 37 ans, a rapporté l’AFP dans une dépêche vendredi.
Lors d’un rassemblement vendredi, les dirigeant de la nouvelle coalition qui tient les choses en main au Mali ont salué l’intervention des militaires: “il n’y a pas de coup d’Etat, il n’y a pas de junte, nous avons des Maliens qui ont pris leurs responsabilités”, expliqué l’un de ces dirigeants, Mohamed Aly Bathily.
L’influent imam Mahmoud Dicko, figure morale dont le rôle a été crucial dans la mobilisation anti-IBK, a lui annoncé à la foule retourner “à la mosquée”, avant de remercier les militaires putschistes et d’appeler à “chasser les démons de la division”.