Il y a bientôt 19 ans, le journaliste français Bruno Masure avait écrit un livre dont le titre : « La télé rend fou mais je me soigne » doit être médité partout dans le monde mondialisé où le petit écran envahissant fait beaucoup de bien mais encore davantage de ravages. Dans les têtes et dans les comportements.
Certains ne se relèvent vraiment jamais de leur « quart d’heure de gloire ».
Et au vu de la trajectoire-descente aux Abysses du mouvement sénégalais « Y-en-a marre », le doute n’est plus permis : les membres de cette ONG n’arrivent plus à trouver leurs repères et ont perdu pied après la défaite du régime de Abdoulaye Wade et l’avènement de la deuxième alternance au Sénégal.
Ce mouvement créé il y a 6 ans environ pour protester contre les coupures intempestives d’électricité et qui s’est investi ensuite dans l’engagement citoyen a connu ses heures de gloire en étant en phase avec le moment opportun de la lutte contre un régime à la dérive.
Une fois ce moment de communion avec les populations terminé car le combat l’était aussi, les « y-en-a maristes » ont peu à peu perdu pied dans l’opinion avec moins de couverture télévisuelle. Et ce retour dans l’anonymat est toujours très difficile après que les caméras et les micros se font de plus en plus rares.
Le manque s’installe et la drogue de la notoriété fait son effet. Il faut donc trouver de nouveaux combats-prétextes pour REVENIR SUR LE CHAMP MÉDIATIQUE.
Depuis 5 longues années « y-en-a marre » ronge son frein et cherche une cause à embrasser, celle qui serait la plus médiatique possible pour que les lumières des projecteurs les illuminent à nouveau.
Les rappeurs Thiat et « Fou malade » ont dû constater que leur musique ne nourrit pas son homme au Sénégal car son audience est limitée face à un Mbalakh tyrannique et beaucoup plus épicé.
Alors ils ont décidé de décréter que : « le régime de Macky Sall piétine les libertés » contre toute évidence. Et pour joindre les actes à la parole, annoncent « une marche pour le 7 avril ».
L’alibi trouvé est l’arrestation du maire de Dakar et les procédures judiciaires en cours concernant l’édile de la mairie d’arrondissement de la Médina.
Étonnant de la part de membres d’un mouvement qui s’était engagé dans l’action civique et logiquement devrait combattre les détournements de deniers publics et la corruption sous toutes ses formes. Qui devraient applaudir des deux mains lorsque la justice entre scène pour élucider les problèmes et protéger l’argent du contribuable. Mais non, l’occasion est trop belle pour profiter d’une certaine couverture médiatique et se rappeler au bon souvenir des sénégalais.
Le problème est que « Y-en-a marre » court derrière son ombre, ce passé de la fin du régime Wade qui n’est plus qu’un très mauvais souvenir pour le peuple sénégalais.
La « cause de Khalifa Sall » n’en est pas une. Il s’agit d’une banale affaire de détournement de deniers publics révélée et confirmée par les auditions des protagonistes auprès du doyen des juges.
En effet il est maintenant établi que Khalifa Sall recevait tous les mois 30 millions de Fcfa en faisant faire des fausses factures d’achat de riz et de mil. Il l’a reconnu en précisant que c’était une façon de s’octroyer des « fonds politiques » par le biais de la caisse d’avance de la mairie de Dakar.
Sauf qu’il n’y a pas de « fonds politiques » au Sénégal mais des « fonds spéciaux » votés par l’assemblée nationale pour les institutions de souveraineté. La mairie de Dakar n’en fait pas partie. Il y a eu donc une pratique frauduleuse qui a duré de 2011 à 2016 et qui a permis le vol d’un milliard huit cents millions de Fcfa.
Voilà les faits. Où peut-on trouver des pratiques gouvernementales illégitimes ou attentatoires à la démocratie ? NULLE PART !
Maintenant « Y-en-a marre » peut décider de devenir un parti politique d’opposition borné et/ou nihiliste qui fait feu de tout bois. Ou s’oppose pour s’opposer ?
Quoiqu’il en soit ; il faut constater la dérive opportuniste et politicienne, la volonté de revenir au devant de l’actualité, de surfer sur des évènements qui n’ont rien à voir avec le combat citoyen dont se réclame « Y-en-a-marre ».
On le comprend : le sevrage télévisuel est traumatisant. Du jour au lendemain, plus de sollicitation, plus de caméras, plus d’images cathodique, RIEN.
Accepter ce retour à l’anonymat est pénible voire frustrant car joindre les deux bouts en tant que rappeur est une gageure au Sénégal. Alors on broie du noir et on accuse le pouvoir « qui n’a pas renvoyé l’ascenseur ». Surtout lorsqu’un souteneur comme Lamine Diack est lui aussi en difficulté et ne peut plus aider à l’achat de billets d’avion.
Dès lors la frustration se transforme en colère pour des gens dans la dèche, abandonnés des télés et orphelins des voyages que permettait la générosité de l’ex-boss de l’IAAF, « Y-en-a-marre » est dans la déprime et c’est compréhensible.
Mais sa fuite en avant dans des attaques injustifiées et outrancières contre le régime de Macky Sall va le décrédibiliser davantage. Car cette fois le combat n’est pas populaire parce qu’il n’est pas juste. Marcher pour défendre le détournement de deniers publics ? Encenser des voleurs de la république ? Ce serait insensé !
C’est pour quoi l’appel à l’insurrection populaire de Khalifa Sall a été un flop.
« Y-en-a-marre » a encore du temps pour revenir à la raison et PRENDRE SON MAL CATHODIQUE EN PATIENCE. La télé rend fou certes ; mais quand on s’appelle déjà…« fou malade »…