Le premier tour des élections présidentielles en Tunisie a ramené leur lot de surprises. Et ce, notamment avec l’arrivée au second tour de la présidentielle en Tunisie de deux candidats ayant fait campagne sur des plateformes « anti-système ». Une donne qui présage de profonds bouleversements, et soulève de nombreuses interrogations sur la suite.
Avec une abstention-sanction de dimanche dernier, les électeurs tunisiens ont donc rejeté les candidats traditionnels. « Cette abstention exprime un réel rejet du système, plus qu’un désintérêt. Il y a un ras le bol d’une classe politique qui n’a pas répondu aux attentes économiques et sociales », estime le politologue Hamza Meddeb, cité par l’AFP.
Selon des résultats encore provisoires, l’universitaire sans parti politique Kais Saied est arrivé en tête du premier tour de la présidentielle tunisienne avec 19% des voix. Selon des résultats officiels préliminaires portant sur plus d’un quart des suffrages, annoncées par l’Instance des Élections (ISIE), Kais Saied devance l’homme d’affaires en prison Nabil Karoui (14,9% des voix selon ce décompte partiel), au coude à coude avec le candidat du parti d’inspiration islamiste Ennahdha, Abdelfattah Mourou (13,1% des voix).
Ces résultats vont dans le même sens que les chiffres avancés dimanche soir par deux instituts de sondage privés tunisiens, qui plaçaient Saied en tête devant Karoui. Toutefois, ces sondages mettaient Mourou en troisième position avec un plus grand écart.
Sept millions d’électeurs étaient appelés dimanche à départager 26 candidats pour le premier tour de ce scrutin, qui s’est déroulé sur fond de grave crise économique et sociale, et dans un contexte de rejet des élites politiques traditionnelles.
La participation a été de 45,02% selon des chiffres encore provisoires de l’ISIE, un taux faible en regard des 64% enregistrés lors du premier tour de la présidentielle de 2014. Les candidats Saied et Karoui, qui ont revendiqué leur qualification dès dimanche soir, ont tous deux fait campagne sur le sentiment de rejet des élites politiques.
Fin connaisseur de la Constitution, Kais Saied s’est fait connaître comme commentateur politique et cultive une image de « M. Propre » incorruptible et au-dessus de la mêlée. Nabil Karoui, pourtant issu de l’establishment tunisien, a vu son image d’« anti-système » renforcée après son incarcération, fin août, dans le cadre d’une enquête pour blanchiment et fraude fiscale. Il a bâti sa popularité ces dernières années en organisant des opérations caritatives dans les régions défavorisées du pays, et a derrière lui la puissance d’une chaîne privée, Nessma, dont il est le fondateur.