Fayez al-Sarraj et Khalifa Haftar se rejettent mutuellement la responsabilité de l’attaque du camp de réfugiés.

C’est mardi soir, que le camp d’Ajourah, abritant quelques 600 réfugiés d’Afrique noire, a été pris comme cible par un bombardement qui aura fait plus de 40 morts et une centaine de blessés. Le camp se situe à la proximité d’un site militaire du Government of National Accord (Gouvernement d’Entente nationale), dirigé par Fayez Al-Sarraj. Ce dernier accuse l’Armée Nationale Libyenne (ANL) d’en être l’auteur, ce qu’il réfute et parle de “complot”.

Le camp d’Ajourah, situé à quelques encablures d’un site militaire du GNA et abritant quelque 600 réfugiés africains dont la majorité sont des Soudanais et des Érythréens, a été bombardé mardi 2 juillet 2019. 44 morts ont été dénombrés sur le coup et plus de 80 blessés jonchaient le sol du grand hangar N°3, qui sert d’abri à ces jeunes africains à la recherche d’un paradis terrestre.

Le GNA de Fayez Al-Serraj n’a pas hésité à accuser les forces du maréchal Khalifa Haftar d’être l’auteur de cette attaque “barbare” contre des objectifs civils. En revanche, le porte-parole des forces pro-Haftar, Ahmad Al-Mesmari, a démenti toute implication dans l’attaque, accusant en retour, le GNA de “fomenter un complot pour leur faire endosser la responsabilité du carnage“. Il ajoute que “nos tirs, très précis, n’ont ciblé que des objectifs militaires“, indique-t-il, en rejetant la responsabilité de cette tuerie, qu’il impute au GNA, qui “cherche à faire des réfugiés africains des chairs à canon“.

La communauté internationale, en partie responsable de cette tragédie, s’est encore émue, sans pour autant prendre des mesures concrètes pour qu’une telle bavure ne se répète dans l’avenir. La France a ainsi condamné l’attaque, tout comme le ministre italien des affaires étrangères, Enzo Moavero, a exprimé sa consternation.

Pour leur part, les États-Unis ont vivement dénoncé le bombardement qualifié d’« abject ». L’émissaire des Nations unies (ONU) en Libye, Ghassan Salamé a aussi déclaré : “cet attentat pourrait clairement constituer un crime de guerre, frappant des innocents“. Le Conseil de sécurité de l’Onu a tenu mercredi dernier, une réunion d’urgence sur le sujet “mais les États-Unis ont empêché l’adoption d’une condamnation unanime de cette attaque meurtrière“, indiquent des diplomates ayant pris part à la réunion.

Le projet de texte était porté par le Royaume-Uni qui appelait aussi à un cessez-le-feu. Il est à signaler que les États-Unis sont favorables aux forces du maréchal Haftar. Ce dernier aurait passé une vingtaine d’années au pays de l’oncle Sam et aurait déjà obtenu une nationalité américaine.

En tout état de cause, la responsabilité de cette attaque inhumaine contre un centre de réfugiés est imputable, d’abord, aux États africains émetteurs, incapables d’offrir des perspectives d’avenir à leur jeunesse. Elle est aussi imputable à l’Union africaine, toujours absente, chaque fois que l’Afrique a vraiment besoin d’elle. La communauté internationale, qui fait preuve d’irresponsabilité face au dossier libyen, gagnerait à être plus claire par rapport aux forces en présence en Libye.

Un cessez-le-feu s’impose en dépit de la réticence du maréchal Haftar, fortement diminué par l’interventionnisme turc qui a complètement changé la donne sur le terrain. Parmi tous ceux qui interviennent en Libye, Recep Tayyip Erdogan semble être le plus engagé et le plus déterminé.

Il a récemment fourni aux frères musulmans qui combattent aux côtés du GNA, armes et munitions de dernier cri. Ceci a permis aux alliés de Al-Serraj de récupérer la ville de Garyan, située à centaine de kilomètres de Tripoli. Une ville qui servait de centre des opérations aux troupes du maréchal Khalifa Haftar. Cette guerre des “puissances” sur le sol libyen, risque de transformer ce pays en un Afghanistan-bis et exposer ses habitants à des catastrophes humanitaires dont les méfaits seraient incalculables.