La levée de l’immunité parlementaire du député-maire Bathélémy Dias de la commune dakaroise Sacré-Cœur–Mermoz, est le dernier rebondissement de la crise qui secoue le parti socialiste sénégalais(PS).
« L’affaire Dias » avait éclaté sous la mandature Wade avec l’attaque de sa mairie par des nervis et sa riposte filmée arme au poing avait déjà valu un séjour carcéral à l’édile. L’arrivée au pouvoir de Macky Sall, allié au PS a permis à Dias de devenir député avec la coalition BBY(benno bokk yakaar : ensemble pour le même espoir) et son « affaire » avait été gelée de facto. Jusqu’à ce qu’elle soit remise sur la table et curieusement au moment où il s’est signalé par ses propos violents contre son mentor d’alors et toujours patron du PS, Ousmane Tanor Dieng.
Dias a choisi Khalifa Sall, maire de Dakar et se bat pour qu’il devienne candidat socialiste contre Macky Sall en 2019.
Ousmane Tanor Dieng récemment porté à la présidence du HCCT(haut conseil des collectivités territoriales) renforce sa relation avec le président Macky Sall qui l’a propulsé au troisième rang institutionnel de l’Etat. Il a déjà engagé le PS pour les prochaines législatives au sein de BBY.
La logique politique exige qu’il en soit de même pour la présidentielle de 2019.
Barthélémy Dias et les dissidents socialistes dont les maires de la ville de Podor, Aissata Tall Sall et de la mairie d’arrondissement de la médina, Bamba Fall et d’autres refusent de suivre cette démarche. Ils souhaitent que leur formation se désengage de BBY et se prépare à la conquête du pouvoir.
La ligne de fracture s’est élargie et aucune réconciliation ne semble plus possible. C’est la lutte politique à mort. Et Ousmane Tanor Dieng qui s’accroche à son fauteuil de secrétaire général du PS et à son fromage du HCCT ne va pas reculer. Il tient fermement l’appareil du parti qu’il a remodelé selon ses intérêts depuis les départs successifs de Djibô Ka, Moustapha Niasse, Robert Sagna, Mbaye Jaques Diop, Souty Touré, Mamadou Diop etc…
En vérité le PS a déjà implosé depuis lors et c’est ce qui explique sa défaite historique de l’an 2000 et celles de 2007 et 2012.
Depuis Ousmane Tanor Dieng reste solide à la barre malgré ses revers électoraux successifs, toujours devancé par Niasse.
Il a compris qu’il n’avait aucune chance d’accéder à la présidence et se contente désormais de gérer ses intérêts personnels. Il est réaliste.
Les dissidents ne le sont pas. Ils veulent renverser la table et ont malheureusement choisi le mauvais cheval Khalifa Sall qui a eu le vent en poupe en 2014 mais n’a pas osé franchir le Rubicon.
Maintenant il semble obliger d’engager le bras de fer et de se lancer dans la bataille de 2019 qui sera double, au moins avec les présidentielles et les municipales. Voire triple si les législatives sont décalées.
La bataille au sein du PS est perdue d’avance; les dissidents ne peuvent pas la gagner. Ils vont quitter comme leurs prédécesseurs. Peuvent-ils affaiblir encore davantage le PS ? Oui. Mais la question est de savoir jusqu’à quel point.
Ousmane Tanor Dieng « est dans le pouvoir » comme on dit. Il a des moyens et va les utiliser. Cela suffira-t-il ? Pas sûr pour renforcer la position du PS. Mais assez pour imposer sa volonté.
Le salut des rebelles viendra, peut-être…du PDS de Wade. Une jonction est dans l’ordre du possible comme elle a eu lieu lors des élections pour le HCCT et elle a permis la victoire à Dakar.
Pour la présidentielle de 2019, cela ne suffira pas. Il faudra fédérer toute l’opposition et soulever la majorité de la population. Pour le moment on ne voit pas quelles sont les possibilités pour réaliser un tel exploit…pour le moment.
Quant au PS il va continuer à s’enfoncer dans la crise avec un Ousmane Tanor Dieng droit dans ses bottes et un Khalifa Sall calculateur.
Barthélémy Dias lui va faire face à un jury de cour d’assises avec de sérieux risques de condamnation. Ses bravades et ses coups de gueule lui ont attiré des soutiens certes mais aussi des ennemis.
Il n’a certainement pas peur de la prison pour avoir séjourné dans presque toutes celles qui existent au Sénégal. C’est lui qui s’en vante.