Abassi Madani, chef historique du Front islamique du Salut (FIS), parti islamiste d’opposition dissous en 1992, est décédé mercredi au Qatar. Il y vivait en exil depuis 2003. Madani militait pour la création en Algérie du premier État islamique du Maghreb.
Abassi Madani avait appelé à la lutte armée après l’interruption en 1992 par l’armée du processus électoral, face à la victoire annoncée du FIS aux premières législatives multipartites du pays qui allait plonger l’Algérie dans une décennie noire de guerre civile, dont le bilan officiel est de 200.000 morts.
« Il est mort dans un hôpital de Doha après une longue maladie », a déclaré à l’AFP Ali Belhadj, son ex-bras droit. Ancien chef de l’Armée islamique du Salut (AIS), bras armée du FIS, Madani Mezrag a confirmé le décès de Madani à l’AFP, indiquant avoir lui aussi été informé par la famille.
Madani est donc décédé mercredi à 88 ans dans un hôpital de Doha. Il avait quitté l’Algérie en 2003 après avoir été libéré de prison où il avait purgé une peine de 12 ans pour atteinte à la sûreté de l’État. Il avait été aussi interdit de toute activité politique.
Né en 1931 à Sidi Okba, une palmeraie de l’Est algérien, Abassi Madani a participé au déclenchement de la guerre d’indépendance contre le pouvoir colonial français (1954). Licencié en philosophie, il décroche en Grande-Bretagne, grâce à une bourse, un doctorat en Pédagogie et Sciences de l’éducation. Professeur de psycho-pédagogie à l’université d’Alger, Abassi Madani milite tôt – dans une Algérie régie par le parti unique – pour un islam politique, dont il devient un chef de file et qui lui vaut un séjour d’un an en prison en 1982.
Après la large victoire, en juin 1990, du FIS aux élections locales – premier scrutin pluraliste de l’histoire de l’Algérie – Madani se comporte en successeur virtuel du président Chadli Bendjedid, en fin de mandat. Son appel à une « grève générale illimitée » en mai-juin 1991 pour forcer le président Bendjedid a organiser des législatives anticipées tourne à l’épreuve de force et dégénère en affrontements entre forces de l’ordre et manifestants.
L’armée décrète l’état de siège le 5 juin 1991 et le fait arrêter avec Ali Belhadj. C’est depuis sa cellule que Abassi Madani assiste à la fin de cette même année à la victoire du FIS au 1er tour des législatives qui annonce un raz-de-marée au second, à l’annulation du scrutin et la dissolution de son parti début 1992.
Cette dissolution du FIS interrompt le processus démocratique et plonge le pays dans une décennie de guerre civile, groupes islamistes armés contre forces de sécurité, mais dont les civils figureront en nombre parmi les 200.000 morts officiels du conflit, victimes notamment des attentats ou massacres attribués aux maquis islamistes.