La polémique a été vive ces temps-ci entre responsables turcs et français. C’est le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian qui a ouvert les hostilités en déclarant qu’il n’avait pas eu connaissance de partage d’informations entre son pays et la Turquie relevant que « le président Erdogan se prête à un jeu politique particulier dans cette circonstance ». Il n’en fallait pas plus pour déclencher l’ire des Autorités turques qui n’ont pas manqué de réagir.
Jean-Yves Le Drian n’avait pas bien apprécié les déclarations du président turc Raceep Tayyip Erdogan selon lesquelles « La Turquie a partagé les informations à sa disposition avec l’Arabie Saoudite, les États-Unis et la France, entre autres ».
Il a réfuté la thèse du président Erdogan, en affirmant que le Président turc « Se prête à un jeu politique particulier dans cette circonstance ». La partie turque a estimé que le chef de la diplomatie française a tenu des propos « inacceptables » voire « impolis » à l’endroit du président Erdogan.
« Le ministre français des Affaires étrangères a dépassé les bornes. Il doit apprendre à s’adresser à un chef d’État », a réagi le chef de la diplomatie turque Mevlüt Cavusoglu. « Accuser notre président de jouer un jeu politique est extrêmement impoli », analyse-t-il.
L’affaire Khashoggi intervient à un moment où le jeu géopolitique dans la zone est d’une extrême densité. Avec l’affaiblissement des leaderships traditionnels notamment l’Iran et l’Arabie Saoudite, la Turquie se fraye son chemin petit à petit. Ses dernières interventions en Syrie ont consolidé sa position dans une région où on assiste à une redistribution des cartes.
La France, comme les États-Unis, l’Allemagne et la Russie se considèrent toujours comme les maîtres incontournables du jeu de la redistribution des cartes. La manière souveraine dont la Turquie a géré l’Affaire Khashoggi témoigne de sa volonté de ne pas jouer un rôle de figurant dans cette guerre de repositionnement.
Le véritable problème entre la France et la Turquie transcende l’Affaire Khashoggi. Dans cette polémique des enregistrements, la Turquie semble avoir le dernier mot : « Je confirme que des preuves liées au meurtre de Khashoggi ont également été partagées avec les institutions concernées du gouvernement français. Le 24 octobre, un représentant des services de renseignement français a écouté l’enregistrement audio et a eu accès à des informations détaillées », a tonné Fahrettin Altun, le directeur de la communication de la présidence turque.
Avant d’enfoncer le clou : « S’il y a un problème de communication entre les différentes institutions au sein du gouvernement français, il appartient aux autorités françaises et non à la Turquie de régler ce problème. »
Comme toute réponse, le ministère français des Affaires étrangères a évoqué un « malentendu ». Le Quai d’Orsay précise : « le ministre a voulu dire qu’il n’avait pas reçu d’informations turques permettant d’établir la vérité complète dans l’affaire Khashoggi, en l’occurrence sur les circonstances et les responsables de ce meurtre », déclare le Quai d’Orsay, avant d’ajouter : « La vérité complète qui nous importe ne tient pas seulement à des enregistrements turcs, quelle qu’en soit la nature. La vérité complète elle est aussi à rechercher à Riyadh, dans nos échanges avec nos autres partenaires ».
Ainsi, ce qui a failli déboucher en un incident diplomatique, venait d’être étouffé diplomatiquement.