Depuis Alger, les critiques d’Emmanuel Macron contre un « système politico-militaire » en place en Algérie sont perçues comme « électoralistes », mais elles traduisent aussi selon des experts le dépit du président français après l’apparent échec de sa politique de réconciliation mémorielle.
Alger a décidé samedi le « rappel immédiat » de son ambassadeur à Paris, en réaction à des propos relayés par le journal Le Monde où le président français affirme que l’Algérie, après son indépendance en 1962, s’est construite sur « une rente mémorielle », entretenue par « le système politico-militaire » et questionne l’existence d’une nation algérienne avant la colonisation française.
Dimanche, des sources militaires françaises ont indiqué qu’Alger avait interdit de facto le survol de son territoire aux avions militaires français en guise de riposte.
« C’est un vieux couple qui ne peut plus vivre ensemble mais qui sait qu’il ne peut pas se séparer », selon Kader Abderrahim, directeur de recherche à l’institut IPSE à Paris,cité par l’AFP, et qui a cependant minimisé l’ampleur de la crise.
« Les Algériens sont imprévisibles. Mais côté français, au bout d’un moment, on va vouloir éviter la rupture car la diaspora qui représente pas loin de 2 millions de personnes pourrait se trouver déchirée », analyse Kader Abderrahim.
A Alger, l’ambiance est électrique. Le quotidien L’Expression, proche du pouvoir, a estimé que Macron s’est laissé aller à « une digression impardonnable, qui n’a jamais été commise par aucun président français ».
Hassen Kacimi, un expert algérien des questions migratoires, juge que Macron a surtout un objectif électoraliste à l’approche de la présidentielle d’avril 2022. « Les politiques en France sont en pleine campagne, Macron aussi », a-t-il dit à l’AFP, en estimant qu’en France, « l’ambiance est dominée par un discours d’extrême-droite ».
En outre, a-t-il estimé, « les relations entre la France et l’Algérie ne sont jamais sorties du prisme raciste colon/colonisé, où l’Algérie a toujours été traitée de haut, de manière méprisante ».
Un point de vue que tempère l’expert parisien de l’IPSE, en soulignant que « pour la première fois, nous avons deux chefs d’Etat (en France et en Algérie), qui n’ont pas connu la guerre d’Algérie ».