Les premiers couacs entre la junte militaire et le gouvernement civil de Transition en Guinée se révèlent au grand jour. En témoigne le limogeage de Fatoumata Yarie Soumah, ce week-end, suite à un désaccord avec des responsables de la présidence de la République sur le fonctionnement de son Ministère. Elle a été remplacée par Moriba Alain Koné, hier lundi, au poste de ministre de la Justice et des Droits de l’homme.

La désormais ancienne Garde des sceaux paie, ainsi, d’avoir marqué son désaccord, après que la Présidence a convoqué une réunion avec les magistrats, le 2 janvier, sans son aval, pour leur expliquer la « politique pénale de la Transition ».

Dans une lettre adressée au Secrétaire général de la Présidence, le Colonel Amara Camara, Fatoumata Yarie Soumah souligne que les procédures ne sont pas respectées par la junte.

Dans sa correspondance, elle demande l’annulation de la réunion, précisant que la politique pénale de la Transition, « ne se discute pas entre le président de la Transition et le personnel de la Justice, mais entre le président de la Transition, le Premier ministre et le ministre de la Justice ».

Pour toute réponse, la ministre a été limogée ce week-end. L’on indique que cette réaction de Fatoumata Yarie Soumah, n’est que la résultante d’une somme de frustrations depuis qu’elle occupe son poste. Par exemple, sa liste de propositions de nominations de magistrats, avait été légèrement modifiée, sans qu’elle ne soit consultée au préalable.

La décision de la junte de rebaptiser l’aéroport de Conakry, Ahmed Sekou Touré, du nom de l’ancien président, n’était pas, non plus du goût de l’ancienne ministre.

Dans tous les cas, le limogeage de la ministre de la Justice, deux mois seulement après la formation du gouvernement civil, tranche d’avec l’assurance donnée par le président de la Transition, le Colonel Mamadi Doumbouya, d’œuvrer pour la séparation des pouvoirs. Il révèle également de sérieux dysfonctionnements dans l’appareil d’Etat guinéen.

Faut-il, en effet, rappeler la critique du Premier ministre, Mohamed Béaovogui, après la décision du Colonel Mamadi Doumbouya de donner le nom d’Ahmed Sekou Touré à l’aéroport de Conakry.

« Je suis surpris, mécontent et dépassé », avait indiqué le Chef du gouvernement, regrettant de n’avoir été « ni consulté, ni associé dans la prise de décision », tout comme Fatoumata Yarie Soumah.

Voilà, en tout cas, des dérives autoritaires dénoncées, qui pourraient enrayer la machine entre la junte militaire et le gouvernement civil, concernant notamment le contrôle de l’Exécutif.

Les militaires au pouvoir en Guinée, qui n’ont toujours pas communiqué un calendrier fixant la date des prochaines élections et la durée de la Transition, comme le réclame la Cédéao.